L'allaitement de l'adulte en islam
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L’allaitement des adultes (arabe : رَضَاعَةُ الْكَبِيرِ), ou l’acte d’allaiter un homme adulte, est mentionné dans plusieurs recueils de hadiths faisant autorité. Selon cinq hadiths présents dans Sahih Muslim, Mahomet aurait une fois explicitement ordonné à la fille (ou à l'épouse — les sources divergent) d’un compagnon nommé Suhail d’allaiter un affranchi adulte nommé Salim, afin que ce dernier devienne le mahram de la fille — c’est-à-dire une personne avec qui elle ne peut se marier —, rendant ainsi la cohabitation de Salim avec la famille appropriée et légale.[1] Des récits présents dans le Muwatta de l’imam Malik[2] et dans le Sunan Ibn Majah[3] ajoutent que cet ordre était renforcé par un verset du Coran, l’écriture sacrée de l’islam, qui était encore présent dans le texte après la mort de Mahomet, indiquant qu’il n’avait pas été abrogé de son vivant. Le récit contenu dans le Sunan Abu Dawud poursuit avec Aïcha, l'épouse préférée de Mahomet, racontant que, pendant qu’elle était "occupée par [la mort de Mahomet]", "un mouton domestique est entré et a mangé" le morceau de papier sur lequel était écrit le verset de "l’allaitement de l’adulte". Cette pratique, sanctionnée par plusieurs juristes traditionnels, est aujourd’hui largement rejetée par les savants musulmans contemporains.
Traduit littéralement, "mahram" signifie "ce qui est interdit (haram)", ce qui explique le vocabulaire utilisé dans les hadiths (par exemple : "[il] deviendrait illicite pour [elle]"). Le mot mahram désigne les membres de la famille qu’il est interdit d’épouser. En raison du fait que les mahrams ne doivent pas se considérer mutuellement comme des partenaires maritalo-sexuels potentiels (ex. : frère et sœur), la femme n’est pas tenue d’observer toutes les exigences du hijab et peut se retrouver seule avec un homme.
À la suite de la publication en Égypte d’un livre promouvant l’allaitement des adultes par le Dr Abd Al-Mahdi Abd Al-Qadir, un érudit d’al-Azhar (le "Harvard de l’islam"), un autre érudit d’al-Azhar, le Dr Izzat Atiyya, a publié une fatwa en faveur de cette pratique dans un hebdomadaire très lu en 2007, provoquant une controverse nationale et internationale. Le gouvernement égyptien a ensuite ordonné le retrait de ce numéro des rayons des vendeurs et le Dr Atiyya a été suspendu de son poste à al-Azhar.[4]
Allaitement d’un adulte dans les écritures
Dans les hadiths
Un chapitre entier du Sahih Muslim, contenant six hadiths, est dédié au sujet de « L’allaitement d’un adulte » (باب رَضَاعَةِ الْكَبِيرِ).[5] Les hadiths décrivent comment, par l’allaitement, un homme adulte peut devenir le mahram d’une femme, et donc être autorisé à se trouver seul avec elle.
Des hadiths concernant l’allaitement d’un adulte se trouvent également dans le Muwatta de l’imam Malik, le Sunan d’Ibn Majah, et le Musnad de l’imam Ahmad.
L’avis d’Aïcha contre celui de ses coépouses
L’un des six hadiths sur l’allaitement d’un adulte dans le Sahih Muslim décrit Aïcha comme la personne ayant ordonné aux compagnons de Muhammad de mettre en œuvre la pratique sanctionnée par ce dernier.
Un récit rapporté dans le Umm de l’imam Shafi’i apporte davantage de précisions, indiquant qu’Aïcha appliquait cette exigence d’allaitement à tous ceux qui souhaitaient lui rendre visite. L’imam Shafi’i décrit aussi comment Aïcha faisait allaiter ses visiteurs par sa sœur Umm Kulthum, puisque le statut de mahram s’étendait aux frères et sœurs d’une même nourrice.
‘Abdullah b. al-Zubayr rapporte que le Prophète a dit : "Une seule tétée ne suffit pas à établir l’interdiction, ni deux."
‘Urwa b. al-Zubayr rapporte que le Prophète ordonna à l’épouse d’Abu Hudhayfa de nourrir au sein son mawla [esclave affranchi], Salim, afin qu’il puisse continuer à vivre avec eux. Le Prophète précisa cinq tétées.
traduction tirée de : John Burton, The Sources of Islamic Law: Islamic theories of abrogation, Edinburgh University Press, p. 157, 1990 (archivé de la version originale)
Des déclarations similaires sont présentes dans le hadith du Muwatta de Malik, où il est aussi dit que les autres épouses de Muhammad rejetèrent fermement cette pratique, considérant qu’il s’agissait d’un cas spécifique à Salim et à la fille de Suhail. [6]
Des sentiments similaires sont exprimés dans un hadith du Sahih Muslim.
Dans le Coran, le verset mangé par une chèvre
Les récits transmis dans les hadiths s’accordent sur le fait qu’un verset ordonnant dix tétées fut révélé, puis remplacé par un verset n’en exigeant que cinq. Ces mêmes hadiths précisent que le dernier verset, écrit sur un morceau de papier conservé sous l’oreiller d’Aïcha, fut perdu après la mort de Muhammad lorsqu’une chèvre (ou un mouton) entra dans la pièce et mangea le papier. Comme mentionné plus haut, cette règle était très impopulaire auprès des autres épouses de Muhammad. Le verset coranique sur la lapidation des adultères aurait également été perdu dans cet incident (voir : La lapidation dans la loi islamique).
Fatwas d'Al-Azhar en 2007
Dr Izzat Atiyya
En 2007, le Dr Izzat Atiyya, chef du département des hadiths à l’université al-Azhar (l’une des plus hautes autorités de l’islam sunnite contemporain et l’université islamique la plus renommée au monde – souvent décrite comme le "Harvard de l’islam"), a émis une fatwa autorisant les musulmans à mettre en œuvre la pratique de l’allaitement des adultes pour éviter les inconvénients sociaux et professionnels découlant des exigences du hijab féminin. Il encourageait l’allaitement par les sœurs ou la mère d’une femme afin d’obtenir le statut de mahram, si, pour une raison quelconque, la femme ne pouvait pas allaiter directement. Il encourageait également les femmes adoptant des enfants – puisque l’adoption n’est pas légalement reconnue par la loi islamique – à allaiter leurs fils adoptifs, quel que soit leur âge, afin d’établir une relation mère-fils légale. La fatwa a été publiée dans al-Watani al-Yawm, un hebdomadaire du parti au pouvoir en Égypte, le Front démocratique national, et expliquée par le Dr Atiyya lui-même lors d’une interview accordée à la publication. Le Dr Atiyya a affirmé à plusieurs reprises que les sources qu’il citait provenaient des textes sacrés de l’islam ayant la plus haute autorité possible. Selon lui, pas moins de 90 000 érudits contemporains ont confirmé que le hadith cité est authentique. Le Dr Abd Al-Mahdi Abd Al-Qadir, un autre savant d’Al-Azhar, avait écrit et publié un livre exposant des idées similaires fondées sur les mêmes sources islamiques avant la fatwa du Dr Atiyya.
« Être ensemble en privé » signifie être dans une pièce dont la porte est fermée, de manière à ce que personne ne puisse les voir... Un homme et une femme qui ne sont pas membres de la même famille n’y sont pas autorisés, car cela suscite des soupçons et des doutes. Un homme et une femme seuls ensemble n’ont pas nécessairement de relations sexuelles, mais cette possibilité existe, et l’allaitement offre une solution à ce problème... J’insiste également pour que la relation d’allaitement soit documentée officiellement par écrit... Le contrat précisera que cette femme a allaité cet homme... Après cela, la femme peut enlever son hijab et exposer ses cheveux en [présence] de l’homme...
"...l’homme et la femme doivent être liés par l’allaitement. [Cela peut aussi être réalisé] par la mère ou la sœur de l’homme qui allaite la femme, ou par la mère ou la sœur de la femme qui allaite l’homme, puisque [toutes ces solutions les transforment légalement] en frère et sœur...
"La logique derrière [le concept] d’allaitement d’un adulte est de transformer une relation bestiale entre [deux personnes] en une relation religieuse fondée sur des devoirs [religieux]... Puisque cet allaitement a lieu entre [deux] adultes, l’homme conserve le droit d’épouser la femme [qui l’a allaité], alors que [la femme] qui a allaité [un homme] dans son enfance n’a pas le droit de l’épouser...
L’adulte doit téter directement du sein [de la femme]...". [Ceci selon un hadith attribué à Aïcha, épouse du Prophète Muhammad], qui rapporte que Salem [le fils adoptif d’Abu Hudheifa] a été allaité par la femme d’Abu Hudheifa alors qu’il était déjà un homme adulte avec une barbe, sur ordre du Prophète... D’autres méthodes, comme [le transfert] du lait dans un récipient, sont [moins souhaitables]...
"[Concernant la possibilité d’utiliser un tire-lait, qui] augmente la production des glandes mammaires... c’est une question pour les médecins et les savants religieux, qui doivent déterminer si le lait [ainsi produit] est du vrai lait, c’est-à-dire si sa composition est identique à celle du lait originel [de la femme]. Si tel est le cas, cette méthode est permise...
Le fait que le hadith sur l’allaitement d’un adulte paraisse inconcevable à l’esprit ne l’invalide pas. Il s’agit d’un hadith fiable, et le rejeter revient à rejeter le Messager d’Allah et à remettre en question la tradition du Prophète."voir aussi : Al-Watani Al-Yawm, 15 mai 2007, Égypte, National Democratic Front Party
La fatwa du Dr Atiyya a provoqué une immense controverse en Égypte et à l’international. Peu après sa publication, un comité d’al-Azhar a suspendu le Dr Atiyya de son poste académique, et le ministre de l’information égyptien a ordonné le retrait de l’édition concernée de al-Watan al-Yawm des kiosques. Al-Azhar a exigé du Dr Atiyya qu’il publie des excuses publiques. Le Dr Atiyya a obtempéré.[4]
voir aussi : Al-Watani Al-Yawm, 22 mai 2007, Égypte, National Democratic Front Party
Réponses
Le président du Conseil suprême d'al-Azhar, le cheikh Dr Muhammad Sayyid Tantawi, a publiquement refusé d'accepter les excuses du Dr Atiyya.[4]
Le Dr Abd al-Fatah Asaker a commenté en affirmant que des hadiths tels que ceux en question ne pouvaient être acceptés comme authentiques, même s'ils provenaient du Sahih Bukhari ou de Sahih Muslim.[4]
Les Frères musulmans ont également critiqué sévèrement la fatwa et ont porté l'affaire devant le parlement. Malgré les discussions menées par 50 députés égyptiens, ils "se sont abstenus de déposer une question parlementaire afin d'éviter de provoquer un trop grand scandale".[4]
Voir aussi
- Articles wikiislam en français
- Coran, hadith et savants : Traditions étonnantes et remarquables
- La lapidation dans la loi islamique
- Coran, hadith et savants : Aicha
- Coran, hadiths et savants : la histoire textuelle du Coran
Articles en anglais:
- Article original: Adult Suckling
Liens externes
- Sunnah absurde: l'allaitement de l'adulte, IslamLab, 20 juin 2016
- Les femmes saoudiennes forcées d'allaiter les hommes pour pouvoir les fréquenter, Slate, 9 Juin 2010
- Allaitement de l’adulte en Islam : le verset du Coran mangé par une chèvre !, L'observateur, youtube.com, 4 avril 2025.
- Allaitement des adultes en islam
- Le Middle East Media Research Institute sur la suspension du Dr Atiyya et les questions connexes (avec de nombreux liens)
- Article en arabe sur Al Arabia en ligne avec plus de 2400 commentaires
- Une fatwa sur l'allaitement maternel suscite l'émoi, BBC, 22 mai 2007 (archive de l'original)
References
- ↑ Sahih Muslim, hadiths 3424-3428
- ↑ Al-Muwatta 30:17
- ↑ Sunan Ibn Majah 3:9:1944
- ↑ 4,0 4,1 4,2 4,3 et 4,4 L. Lavi, "Al-Azhar Lecturer Suspended after Issuing Controversial Fatwa Recommending Breastfeeding of Men by Women in the Workplace", Inquiry & Analysis Series, 355, MEMRI, June 3rd, 2007 (archived from the original); see also Al-Watani Al-Yawm, Egypt: National Democratic Front Party, May 15th, 2007
- ↑ "(7) Chapter: Breastfeeding an adult [باب رَضَاعَةِ الْكَبِيرِ]", Sahih Muslim (archived from the original)
- ↑ Fatwa No 342208: Aa'ishah's view regarding breastfeeding adult, IslamWeb.net, January 1st, 2017 (archived from the original)
- ↑ Lane's Lexicon سقط
- ↑ Lane's Lexicon نسخ
- ↑ Quran 2:106